Le joueur franco-algérien de l’AS Nancy-Lorraine, Salim Baghdad, a raconté sur France Football, hier jeudi, ses malheurs et tout ce qu’il a enduré après les attentats qui ont ciblé Charlie Hebdo en janvier dernier. Tout commence, selon Salim, quelques jours après les attaques du siège du journal.
Ce jour-là, il quitte le centre d’entraînement lorsqu’un supporter engage une discussion sur le foot avec lui avant de le prendre tout à coup à partie. « Soudain, il me crache dessus. Il commence à m’insulter. Sale Arabe, sale Bougnoule, on est tous des Charlie, la France aux Français, dégage à Toulouse Mohamed Merah, on sait que tu t’appelles Baghdad », raconte le joueur. Son cauchemar le suit chez lui puisqu’il trouve son épouse en pleurs.
« Elle me dit que tout l’après-midi, des gens sont venus frapper à la porte. Ils ont laissé une poche devant la porte. Je regarde à l’intérieur, il y a des imprimés où il est écrit ‘‘Salim Baghdad, né le 11 septembre, est allé dans le même lycée que Mohamed Merah’’, mais aussi du porc, et le drapeau tricolore ». Plus grave, rapporte France Football, un courrier contenant les mêmes éléments est envoyé au siège de son club.
Il est lâché par son club
Son coach lui conseille d’étouffer l’affaire et lui dit : « Il ne faut pas en parler, ça va prendre d’autres proportions, et en plus c’est politique au niveau de la France car le climat est tendu », révèle Salim qui est reçu en parallèle par le directeur sportif lorrain, Paul Fischer, et questionné par un agent des renseignements généraux. « Il commence à me parler d’une mosquée que je fréquentais à Toulouse, celle de Mohamed Merah. Il me sort une photo dans laquelle on me voit dans la mosquée un vendredi. J’y allais avec des joueurs du TFC, du Stade toulousain et avec les joueurs de Luzenac. Je lui dis que c’est ridicule et ce n’est pas parce que je vais à la mosquée qu’on a le droit de m’insulter de sale arabe, bougnoule ou sarrasin », détaille-t-il.
Selon Salim, à partir de là, son avenir sportif a basculé. « Le coach Pablo Correa a commencé à ne plus me parler. Ils sont partis faire un stage à Nîmes, ils ont pris tout le groupe sauf moi et un autre joueur », s’indigne-t-il.
Paul Fischer réfute cette idée et se justifie : « Cette histoire n’a sans doute pas favorisé son évolution. Mais là, avec Salim, on parle d’un joueur qui avait du mal à franchir le cap ».
Il rêve de rejouer, même en réserve
La vie du joueur de 22 ans a complètement changé : « Je regarde derrière moi quand je sors du foot. Je deviens parano », confie Salim.
Son agent, Samir Fodil, précise : « On en parle maintenant car la situation de Nancy est plus limpide. On n’a pas voulu le faire au moment où le club était en grande difficulté sportive. C’est quelque part par respect à l’entité et aux supporters. Mais on veut que les gens sachent qu’il y a une infime minorité qui s’est très mal comportée avec Salim ».
La seule consolation pour le joueur serait de retrouver la compétition, même avec la réserve du club nancéien en CFA 2. Pourtant, « ses performances avaient été plutôt bonnes avec dix passes décisives en douze matches », rappelle Nabil Djalit dans son article.
« Je n’ai pas eu ma chance, et tous les joueurs le savent. Sinon à quoi ça rime de faire signer un mec 8 mois et ne pas lui donner une seule seconde de jeu ? Des joueurs sont allés voir le coach pour lui dire de m’essayer » sans résultat, regrette le joueur.
TSA